un peu d’histoire
Le 12 avril 1229, le dernier comte de Toulouse, Raimond VII, sorti exsangue de l’épopée sanglante des croisades, signe le traité de paix ramenant ses possessions à peau de chagrin et lui interdisant de reconstruire la moindre place forte.
Son ministre, Sicard Alaman, vient d’hériter de son père un vaste domaine situé au nord du Tarn, jouxtant opportunément les terres appartenant à Raimond VII dans le Nord Albigeois. Les armées du roi de France sont installées de l’autre côté, sur la rive sud du Tarn.
Saisissant l’espoir de reconquête qui s’offre à lui, Raimond VII concède en fief à Sicard Alaman le « Puy de Bonafous » aux conditions affichées qu’il y construise un village fortifié dans le but d’y reloger les populations en errances des villages dévastés par les troupes de Simon de Montfort.
Reste à trouver le moyen de contourner l’interdiction du traité et c’est l’évêque Durand de Beaucaire qui, se disant convaincu de la nécessité de bâtir une place forte capable de contenir l’hérésie renaissante en Albigeois, avalisera sa construction.
L’édification de la forteresse s’échelonne sur une vingtaine d’années entre 1235 et, approximativement, 1256. Des améliorations survenues ultérieurement en certains points stratégiques n’ont que sensiblement modifié l’architecture globale du château. L’audacieuse Tour de Guet a été érigée à la fin du XIVème siècle et l’imposante tour orientale fera encore l’objet, du XVIème au XVIIIème siècle, de travaux visant principalement à aménager les bâtiments d’habitation.
Le château est bâti en belle pierre locale sur un plateau d’environ 150 mètres de long sur 40 mètres de large. Son enceinte épouse d’est en ouest, côté sud, le versant abrupt du coteau, tandis que sur sa face nord, l’édifice en retrait du plateau, est protégé par un large fossé. Deux petites tours carrées flanquent les faces nord et sud dans la partie occidentale de l’édifice. Deux autres tours de flanquement sont supposées avoir existé sur chaque front ainsi qu’à l’entrée, en pendant du châtelet d’entrée méridional. L’ensemble se divise en deux parties entourées de courtines rectilignes flanquées au sud-ouest et au nord-ouest de deux tours rondes. L’espace est constitué, à l’est, du château proprement dit avec la demeure seigneuriale et, à l’ouest sur le même niveau, de la longue basse-cour. L’ouvrage dessinait un triangle dont les parties saillantes étaient : le châtelet de l’entrée principale au sud, l’ensemble tour de flanquement – tour de guet – au nord, et une grosse tour à l’est. Seuls ces trois éléments ont survécu.
En 1248, Castelnau, à l’image des cités dominantes, obtient l’autorisation de frapper la monnaie, les raimondins, au château de Bonafous. et le 11 mai 1256, Sicard Alaman octroie une charte des franchises aux habitants pour fixer les règles de vie dans la communauté.
Lors de la donation à Sicard Alaman en 1234, la seigneurie de Castelnau de Bonnafous s’étendait sur 7 657 hectares. Jusqu’à la révolution, ce fut une puissante baronnie dont le titre donnait droit d’entrée aux Etats Provinciaux de Languedoc.
En 1818, le château est vendu par ses derniers propriétaires. Les acquéreurs n’y voient qu’une carrière à exploiter …
Dans la nouvelle édition de Dom Vayssète par Du Mège vers 1850, on lit :
« Le château de Bonafous, nommé depuis Castelnau de Lévis, existait dans son entier, il y a trente ans. Nous en avons vu, pour la première fois, les ruines en 1821. Il occupait le sommet d’une hauteur escarpée sur la rive droite du Tarn. On y parvenait par des rampes taillées dans la masse de la colline et ses approches étaient défendues par plusieurs ouvrages, de hauts murs l’enveloppaient ; deux tours se dressaient vers le couchant et rendaient de ce côté l’attaque très difficile. Au centre, s’élançait une haute tour svelte, élégante, légère, couronnée de mâchicoulis et de créneaux. Chacune de ses faces était revêtue de pierres taillées avec soin. Aujourd’hui, cette tour reste presque seule au milieu des ruines du château, témoin muet des grandeurs du Moyen-Âge » .
Les vestiges du château sont classés le 2 novembre 1909.
La municipalité de Castelnau s’en rend acquéreur en 1991.
Bibliographie : Sylvie Caucanas, Une seigneurie de l’Albigeois du XIIIè au XVe siècle, thèse de l’École des Chartes, 1977 aux Archives départementales du Tarn – Sylvie Caucanas, La charte de franchise de Castelnau‑de‑Lévis dans Revue duTarn -Sylvie Caucanas, La seigneurie de Castelnau‑de‑Lévis aux XIVe et XVe siècles dans Annales du Midi, janvier mars 1978 – Jean Roques, Castelnau‑de‑Lévis, Albi, 1981.